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Nécrologie

Vous dites : «c’est fatigant de fréquenter les enfants vous avez raison
Vous ajoutez : «parce qu'il faut se mettre à leur niveau, Là, vous avez tort, Ce n'est pas cela qui fatigue le plus, C'est plutôt le fait d’être obligé de s'élever jusqu’à la hauteur de leurs sentiments”

Janusz Korczak mort à Tréblinka en août 1942 pour n’avoir pas voulu abandonner les enfants qui lui avaient été confiés.

Le 6 mai 1992, une grande dame nous a quittés. Ceux nombreux, qui la connaissaient, ne verront, dans cette affirmation, aucune malignité de ma part mais l'expression du respect que je lui portais comme d’ailleurs tous ceux qui l'approchaient. Madame François-Unger (*) est grande de toute son œuvre accomplie, grande par la place qu’elle tient dans le cœur des très nombreux enfants qu’elle a aidés dans des débuts de vie souvent marqués par le malheur. En effet, la grande œuvre de la vie de Madame François-Unger, sa vie pour tout dire, a été Le Renouveau qu’elle avait fondé en 1945 avec le professeur Henri Wallon.

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De gauche à droite : M. André Chauvet, M. Unger (debout), Mme François-Unger et le Professeur Henri Wallon.

Cette maison unique en France, s'était donné pour tâche d’accueillir, d’élever, de choyer des orphelins de la deuxième guerre mondiale et, parmi ceux-ci les plus éprouvés, ceux qui avaient vu leur parents déportés, qui avaient dû fuir, se cacher, survivre au milieu de la barbarie que certains, aujourd’hui, voudraient oublier, voire nier.

A tous ces malheureux Madame François a offert non seulement le gîte et le couvert administratif mais aussi, et surtout, un véritable foyer dans lequel ils ont pu s'épanouir Comme n’importe quel enfant de leur âge. Chaque enfant du Renouveau entrait, avec leur directrice, dans un cercle magique, formé de liens affectifs réels qui ne pouvaient naître que de l’en- gagement total de la raison et du cœur.

Cependant, l’écueil à éviter, aurait été que cette institution isolât les enfants, que leur sinitre passé poussait à se refermer sur eux-mêmes. Madame François, pour mieux les intégrer, choisit, comme médiateur, l’école, pensant ainsi les réconcilier avec le monde et leur donner la chance d’un nouveau départ plein de promesses. Elle avait compris que l’on peut demander beaucoup aux enseignants à condition de ne pas les considérer comme de simples distributeurs de savoir. Les accords qu’elle a passés avec les chefs d’établissement de l’époque se sont avérés miraculeux, que ce soit avec Monsieur Soin pour le C.E.G. ou Monsieur Dardel pour le lycée. Les enfants revenant le soir dans leur établissement y trouvaient, non seulement une aide efficace au travail mais aussi un enseignement artistique, complément indispensable à un développement harmonieux. En somme des conditions matérielles supérieures à bien des enfants du Montmorency de l’époque. Lannuaire des anciens de l’établissement montre à quel point la réussite personnelle n’y fut pas l’exception mais presque la règle.

Intégration donc par l’école mais aussi par la ville dont Madame François a su mettre à profit la tradition d’accueil. Les maires successifs, de Monsieur Dupont à la fin de le guerre à Monsieur Noachovitch, furent pour elle d’une aide précieuse.

Ses réalisations sur le terrain ne doivent pas faire oublier que Madame François-Unger fut également une théoricienne de l’éducation. Son livre L'adolescent inadapté paru aux Presses Universitaires en 1957 reste une bible pour les enseignants qui ont à s’occuper de cette tranche d’âge difficile entre toutes. Il est dédié au professeur H. Wallon qui resta jusqu’au bout son ami. On y lit non pas d’assommantes théories abstraites, conçues dans le calme rassurant d’une bibliothèque, mais l'expérience d’une praticienne illustrée d’exemples vivants et le tout écrit dans une langue fuyant l'obscurité et le jargon pédagogique.

Le souvenir de Madame François-Unger ne saurait être dissocié du souvenir de son fils, l'historien Fred Kupferman, maître de conférences à la Sorbonne, disparu si brusquement il y a maintenant trois ans. Sa mort, en laissant sa mère inconsolable, a brisé une œuvre qui s’annonçait importante pour l'étude de l’histoire contemporaine. Que sa mémoire soit ici évoquée pour être réunie dans le chagrin qui nous affecte tous si profondément.

André Duchesne

Les quatre fondatrices (Mme François-Unger est la deuxième à partir de la gauche)

Note : Nous avons publié dans le numéro deux de notre revue, un petit article de Madame François, des notes de Monsieur SOIN, ainsi que des poèmes de jeunes poètes du Renouveau.

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