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Le Pigeonnier d'Andilly

Nombreux sont les pigeonniers dans le Val d'Oise, une soixantaine ont été inventoriés en 1990, mais ils sont situés essentiellement dans la partie ouest du département. Rares sont ceux qui subsistent plus près de Paris, et celui d'Andilly revêt donc un intérêt tout particulier.

Carte générale du duché d'andilly
Carte générale de haute forest du duché d'Enghien divisée en sept quartiers,
dessinée par Boursier en 1770,
levée par M. de la Vigne, ingénieur de SAS le Prince de Condé en 1728.

Histoire du pigeonnier

Avant 1789, Andilly, comme beaucoup d'autres villages du Val d'Oise, était organisé autour de son église et du château de son seigneur local. Au Moyen-Age, la construction d'un pigeonnier était un privilège réservé à la noblesse ; et même si CRE après le XVI: siècle, les paysans aisés obtinrent le droit de colombage, la plupart des pigeonniers sont la manifestation, dans le paysage, de la puissance du seigneur local.

À Andilly, au XVIIe siècle, il existait deux seigneuries : Andilly le Haut (sur la plateau essentiellement) et Andilly le Bas. Le seigneur d'Andilly le Bas était le grand Arnault d'Andilly, qui se fit construire un château au centre du village. Un plan du duché de la haute forêt de Montmorency, levé sur le lieux par H. Segre en 1686, montre un dessin de ce château, avec à l'extrémité d'une aile un pigeonnier.

Sur la carte générale de la forêt du duché d'Enghien, dessinée par Boursier en 1770, ce château apparaît très nettement avec ses jardins, ses bâtiments, et la grosse tour ronde à l'extrémité du bâtiment longeant la rue : le pigeonnier.

carte postale d'andilly
Carte postale d'Andilly (1910).

Au XVIIIe siècle, la seigneurie d'Andilly le Bas appartient à la famille du Lier, qui obtient la réunion en 1724 des deux seigneuries d'Andilly. En 1787, Mademoiselle du Lier vend la seigneurie d'Andilly le Bas à Jean Jacques Thévenin, fermier général et seigneur de Margency, dont les terres et jardins sont limitrophes. Jean Jacques Thévenin fait immédiatement démolir le château de la seigneurie d'Andilly, car il posséde déjà son château de Margency.

A-t-il, à ce moment là démoli aussi le pigeonnier ? On ne trouve plus aucune trace dans les archives, étant donné que Jean Jacques Thévenin à brûlé le terrier d'Andilly le 23 pluviôse de l'an II (1794), semblant se rallier au nouveau régime et voulant sauver ses biens. À la fin de l'An IE, ses biens sont quand même mis sous séquestre, il est emprisonné avec les autres fermiers généraux.

Sa seigneurie est achetée en 1819 par la Comtesse de Rochefort d'Ally, résidant à Paris, propriétaire jusqu'en 1869. Sur le cadastre de 1832, on peut voir les bâtiments de la ferme dite du pigeonnier, à l'emplacement de l'ancien château des Arnault, et toujours au même endroit, une grosse tour ronde, qui est décrite comme un pigeonnier d'origine, ou d'une reconstruction à l'identique, au même endroit, sur les mêmes fondations ? Etant donné le peu de pigeonniers reconstruits après 1789, il est vraisemblable que le pigeonnier visible en 1832 soit celui de l'ancien château des Arnault, et son vestige.

Le pigeonnier en 1984
Le pigeonnier en 1984.

Cette ferme avec un pigeonnier changea plusieurs fois de propriétaire, jusqu'en 1987, où elle fut mise en vente ; la municipalité fit jouer son droit de préemption, le pigeonnier étant sur une Z.L.F (zone d'intervention foncière). C'est l'office d'H.L.M. du Val d'Oise qui racheta le tout. Il fit démolir la batisse attenant au pigeonnier et s'engagea à restaurer celui-ci, après qu'une procédure d'inscription à l'inventaire ait été engagée. La restauration de ce pigeonnier vient de se terminer cet été 1992.

Description du pigeonnier

Voyons comment se présente ce pigeonnier. C'est une grosse tour ronde, de 7 à 8 mètres de diamètre, aux murs épais, au toit conique comme la plupart des pigeonniers du Val d'Oise. En 1919, une carte postale nous la montre avec son toit surmonté d'un lanterneau et ses deux lucarnes d'envol vers sud-ouest et vers le nord-est (ces bandeaux en saillie juste en dessous du toit évitaient que les rats et les belettes ne viennent détruire les pigeons à l'envol.

En 1984 le pigeonnier s'est bien dégradé le lanterneau sommital a disparu, de même que les lucarnes d'envol, le toit est en très mauvais état, le crépi s'effrite et tombe.

Les boulins
Les niches des pigeons, ou boulins.

L'intérieur, par contre, est encore en très bon état. Il est divisé en deux étages avec deux portes d'accès. Le rez-de-chaussée, semi-enterré, servait de cave et garde-manger aux derniers propriétaires ; le premier étage était entièrement réservé aux pigeons. La salle basse possède un pilier central avec une voûte annu- laire comme à Nesles la Vallée ou Haravilliers. Cette colonne de pierre a pour principale utilité de soutenir l'arbre général qui au premier étage sert d'axe à une échelle mobile permettant de visiter toutes les niches à pigeons (cf. gravure extraite du livre d'Olivier de Serres). Cette échelle a aujoud'hui disparu, les anciens agriculteurs d'Andilly situant sa disparition entre les deux guerres. Par contre les niches à pigeons, les boulins, sont encore intactes, on en dénombre environ 1500, faites ici en argile. Ces niches comprennent une entrée et le nid proprement dit au fond et abritaient chacune un couple de pigeons. Elles ont été très soigneusement faites, comme dans tous les pigeonniers, pour assurer le confort de ces oiseaux si précieux, ce qui explique leur bon état de conservation.

En effet les pigeons étaient particulièrement précieux dans l'ancien régime. Ils servaient de nourriture sur la table des rois et puissants personnages ; Madame Couffy dit dans son ouvrage, qu'au Moyen-Age il ne fallait pas moins de 400 pigeons par jour à la table du roi et 300 à celle de la reine. Mais leur utilité principale n'était pas là : les pigeons fournissaient un excellent engrais, la colombine, engrais très précieux, riche et sec, plus facile à manier que le fumier d'étable. Les pigeons représentaient donc un revenu non négligeable, et le pigeonnier attestait de la puissance de ses propriétaires sur le village. Un descendant de chatelains dans la vallée de la Loire, faisant visiter le colombier du château de ses ancêtres, assurait que le nuage de pigeons s'envolant dans le ciel à l'approche d'un visiteur était aussi le signe manifeste de la puissance de sa famille. Mais pour les paysans du village, c'était une calamité, les pigeons se nourrissant sur les récoltes. Voilà pourquoi tous les cahiers de doléances de la région demandaient l'abolition de ce privilège et la destruction des colombiers.

Plan du pigeonnier
Repris du livre d'Olivier de Serres, ce dessin montre bien l'architecture intérieure d'un pigeonnier avec sa chambre basse, sa chambre haute (avec ses rangées de boulins et son échelle mobile), et sa toiture conique.

Le pigeonnier d'Andilly a survécu, il a gardé intactes sa cave et ses niches à pigeons, maintenant protégées par une toiture refaite soigneusement à l'ancienne, des murs recrépis. Quelle destination peut-il avoir aujourd'hui, pour qu'il puisse être visité et admiré ? À Hazeville, le pigeonnier restauré est utilisé comme lieu de rencontre autour de l'agriculture, de l'artisanat et du tourisme. Celui d'Andilly pourrait-il servir de lieu d'expositions, de rencontre ? À la municipalité de jouer pour valoriser ce témoin d'une vie passée.

Sources documentaires :

Le pigeonnier en 1992
État du pigeonnier d'Andilly en 1992.

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