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À propos des vitraux de la collégiale
Les ordres de chevalerie représentés sur les vitraux

Les puissants seigneurs représentés sur les verrières de la collégiale sont tous membres d’un ordre de chevalerie dont ils portent fièrement le collier. Quels sont ces ordres ? Quand et pourquoi ont-ils été créés ? Qui pouvait en devenir membre ? C'est à ces questions que nous tenterons de répondre.

Romans de chevalerie, ordres de chevalerie, le rapprochement n’est pas fortuit. C’est au XIVe siècle, en effet, que la vogue des romans de chevalerie impose le modèle du preux chevalier, compagnon de son roi qu'il sert, si nécessaire, fidèlement jusqu’à la mort.

C’est alors que, tel le Roi Arthur groupant autour de lui les chevaliers de la Table Ronde, les souverains de l'Europe occidentale vont constituer les premiers ordres de chevalerie connus. Pour entrer dans le groupe restreint des élus, que seul le souverain choisit, certaines conditions doivent être remplies : appartenir à la noblesse, avoir été armé chevalier, s’être illustré sur le champ de bataille (mais, en cette période de guerres incessantes, (c’est la Guerre de Cent ans), les occasions ne manquent pas aux chevaliers de prouver leur vaillance).

L'admission dans l’ordre a lieu généralement une fois par an, lors d’une cérémonie au rituel bien réglé : devant les membres, au complet, revêtus du grand uniforme propre à l'Ordre, l'impétrant prête serment puis recoit les insignes qui rendent désormais manifeste son appartenance au petit groupe de ceux que le souverain a distingués, ceux dont il s’entoure et qu'il désigne ainsi à l'admiration ou à l'envie (?) des autres courtisans.

Le premier ordre connu a été créé, en 1348 par le roi d'Angleterre Edouard III : il s’agit de L'Ordre de la Jarretière.

Pourquoi cette appellation ? On dit que, lors d’une cérémonie, la comtesse de Salisbury perdit sa jarretière et que le roi, galant, la ramassa et s’en para en disant «Honni soit qui mal y pense». Ce qui n'avait été qu’un incident devient alors une mode : tous les courtisans imitent le roi et portent des jarretières. Edouard III décide de n’autoriser qu’un petit groupe de 25 personnes à porter au-dessous du genou gauche une jarretière bleue sur laquelle est brodé «Honni soit qui mal y pense». Ces 25 élus portent également en écharpe, de droite à gauche, un ruban bleu. C’est ainsi qu’est créé, sous la protection de Saint Georges, patron des chevaliers et du royaume d'Angleterre, le premier “ordre de chevalerie”.

Certains étrangers auront, rarement, l'honneur d'y être admis; ce fut le cas du Connétable Anne qui dirigea plusieurs ambassades à Londres et en fut ainsi remercié. Sur son gisant, seul élément du mausolée parvenu jusqu’à nous, le connétable porte toutes ses décorations dont la Jarretière parfaitement visible.

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gisants à la collégiale

La mode lancée en Angleterre est vite imitée sur le continent. En 1351, en France, le roi Jean II crée Ordre de Notre Dame ou Ordre de l'Étoile. Cet ordre disparaît très vite et nous n’en connaissons le costume que grâce aux miniatures des «Grandes Chroniques» ; ce manuscrit conservé à la Bibliothèque Nationale présente en effet, la cérémonie d'ouverture, par le roi, du premier chapitre de l’ordre.

Ordre de Notre Dame ou Ordre de l'Etoile
(celle-ci figure sur le manteau des chevaliers).

Après la défaite de Poitiers (1356), Jean II, prisonnier en Angleterre, n’a plus la possibilité de réunir les chevaliers de l'Étoile ; quant au Dauphin Charles, il est pris par des tâches plus sérieuses et plus urgentes : il lui faut réunir l'énorme rançon exigée pour la libération du roi. Tous les sujets sont taxés : Charles de Montmorency, otage en Angleterre avec Jean le Bon, puis négociateur du traité de paix de Brétigny, signé en 1360, voit ainsi sa participation fixée à 1 037 livres. Pour disposer de cette somme, il vend son hôtel de Paris puis une partie des terres de la châtellerie et augmente les taxes qu'il perçoit sur les marchandises vendues en ville chaque mercredi ; à ceci s'ajoute la quote-part payée par la ville soit 300 livres.

Il en est de même dans tout le royaume ; mais, malgré les efforts consentis par les grands vassaux et le «menu peuple», il est impossible de trouver les 5 millions d’écus d’or exigés et Jean II retourne à Londres où il meurt en 1364. Devenu roi, Charles V se consacre alors uniquement à la remise en état du royaume, et, pendant un siècle, exception faite d’un très éphémère Ordre de la Cosse de Genêt (sic) sous Charles VI, il n’y a plus d’ordre de chevalerie en France.

philippe le bon
Philippe le Bon, duc de Bourgogne.

Quelques decennies plus tard, le duc de Bourgogne Philippe le Bon, l’un des princes les plus riches de l'Occident, crée l'Ordre de la Toison d'Or dont le symbole est un agneau. Il reconnaît par ce choix, que l'essentiel de ses ressources lui est fourni par Bruges, Gand et les autres villes drapantes qui, depuis des siècles, filent et tissent la laine des Flandres.

Guillaume de Montmorency
Guillaume de Montmorency
(Vitrail de la Collégiale de Montmorency)

Créé en 1430 d’abord pour récompenser ceux de ses hommes qui ont fait vœu de partir à la croisade contre les Turcs, l’ordre est ensuite conféré à d’autres familiers et devient vite l’un des ordres de chevalerie les plus appréciés. Le Grand Maître en est toujours le duc de Bourgogne.

Sur le vitrail N°8, c’est bien le duc de Bourgogne Charles de Gand que nous voyons porter le collier à l'agneau ; mais il est, entre temps, devenu roi d’Espagne et Empereur (il s’agit de Charles Quint) et a ainsi transféré la Toison d'Or à la Maison d’Autriche.

En 1469, Louis XI reçoit en l’abbaye du Mont-Saint-Michel 36 gentilhommes portant cape blanche et scapulaire cramoisi auxquels il remet un collier constitué de coquilles alternant avec des nœuds et dont le pendentif représente Saint-Michel terrassant le dragon. Ce sont les premiers membres de l'Ordre de Saint-michel dont la devise «Immensi Tremar Oceani», inspirée par l’océan tout proche, reste inchangée, même après le transfert du siège de l’ordre au couvent des Cordeliers de Paris.

Anne de Montmorency
Le grand Connetable Anne de Montmorency
(Vitrail du Connétable, détail)

Cette distinction, d’abord difficile à obtenir, est ensuite si généreusement accordée par Charles IX qu’elle se déprécie. Louis XIV ne la concèdera qu’à des non-nobles, notamment à des artistes comme Mansart et Lenôtre. Supprimé lors de la Révolution, puis rétabli par Louis XVIII, l’ordre disparaît en 1830.

Henri de Valois avait été élu roi de Pologne le jour de la Pentecôte ; c'est également, au moment de cette fête qu'il devient, en 1574, roi de France. Surpris de cette coïncidence qui lui semble signe du Ciel, Henri III choisit le Saint Esprit pour «patron» de l’ordre qu'il crée le 31 décembre.

le_cordon_du_saint-esprit
Le cordon de l'Ordre du Saint-Esprit.

Les conditions d'admission sont très strictes. Il faut d’abord, et c’est la «condition sine qua non» être catholique : aucun protestant ne sera jamais membre de l’ordre, dont le roi ne devient le Grand Maître, qu'après avoir, au cours de la cérémonie du sacre, prêté serment d’extirper l’hérésie. Il est aussi demandé aux candidats de faire preuve de 100 ans de noblesse et d’être déjà chevalier de Saint Michel; enfin, pour éviter un discrédit semblable à celui dans lequel est tombé ce dernier ordre, Henri III limite à 100 le nombre des chevaliers du Saint Esprit .

La première promotion est reçue le 1er janvier 1579 : elle ne compte que 26 élus. Le cérémonial alors usité sera repris lors des réceptions ultérieures qui, toutes, auront lieu un 1er janvier.

Devant les membres de l’ordre vêtus d’un habit blanc, d’un manteau noir à traîne, brodé de flammes orange, doublé de soie orange et d’un mantelet de soie verte, brodé lui aussi, les impétrants prêtent serment de fidélité à la Religion et au Roi. Ils reçoivent ensuite le collier de l’ordre, composé d’une alternance de fleurs de lys (symbole de la monarchie), de H (pour Henri) et de trophées ; une croix à 8 pointes cantonnées de fleurs de lys, avec en. son centre, à l’endroit une colombe aux ailes déployées et, au revers, l'effigie de Saint Michel, y est suspendue.

C’est avec ce grand uniforme qu’Henri de Montmorency a été représenté sur le vitrail N° 20 ; sur le vitrail N°19, Henri de Bourbon, Prince de Condé, ne porte lui, sur son habit de cour, (comme le font les chevaliers dans les cérémonies courantes), que le ruban ciel auquel est suspendue la croix.

Mentionnons enfin, pour mémoire, l'Ordre de Saint Louis, créé en 1697 par Louis XIV : il s’agit non d’un ordre de chevalerie mais d’un ordre de mérite destiné à récompenser les officiers catholiques ayant servi au moins 10 ans dans l’armée et s'y étant distingués. Tout laisse à penser que Turenne (vitrail N° 21) l’eut reçu, mais il avait, à cette date, déjà été tué au service du Roi.

Jacqueline Rabasse

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Documents

Lettres de l'Ordre de la Jarretière envoyé à Messire Anne de Montmorency, grand Maître de France, par Henri VIII, Roy d’Angleterre.

«Henry par la grâce de Dieu Roy d'Angleterre, & Defenseur de la foy, seigneur d'Irlande, & souverain du tres-noble ordre de S. George nommé la lartiere. A tous ceux qui ces presentes Lettres verront ou orront, salut. Comme nos tres-chers et tres-aimez cousins ANNE DE MONTMORENCY Chevalier, Seigneur & Baron dudit lieu, Comte de Beaumont, grand Maistre & Mareschal de France, & PHILIPPE CHABOT seigneur de Brion, Comte de Neuf-blanche & grand Admiral de France, pour les grands merites de leurs vertus & noblesses, dont la renommée s'est amplement espandue, au mois d'Octobre dernier pafé par nous & nos Confreres Chevaliers & Compagnons dudit noble Ordre en nostre ville de Calais assemblez & conuez, soient esté choisiz & eluz Chevaliers & compagnons d'ideluy Ordre de S. George en certains lieux vacans. Nous voulans ladite election sortir son entier effet & perfection, & nous confians és feauté, discretion, & diligence de noz feaulx & bien aimez Sire Iehan V vallop Chevalier Ambassadeur à present pour nous resident lés nostre tres-cher & tres-aimé frere, cousin, compere, & perpetuel allié le Roy Tres-Chrestien, & Thomas Benault Escuyer un de noz Roys d'armes, les auons ordonnez, commis & deputez, ordonnons, commettons & deputons par ces presentes nos Ambassadeurs, procureurs, & messagers speciaukx, & leur donnons auctorité, & mandement special d'eulx transporter par deuers, nosdits cousins, & leur baïller deliurer & donner l'habit, estatutz, & autres enseignes dudit Ordre, & toutes autres choses faire, exercer, & expedier, qui seront requises & necessaires en ceste partie, auecques toutes les ceremonies deubs & accoustumez en tel cas, selon la forme & estatutz dudit tres-noble Ordre de S. George appelé la lartiere. En tesmoing de ce a& presentes signées de nostre main nous auons fait mettre le sceau dudit Ordre. Donné à Westmonstier le VIL.iour d'Apuril l'an de grâce M.DXXXII. & de nostre regne le XXIV».

Par lettre patente, datée de Boulogne le 24 octobre 1532 le Roy François commanda & enjoignit à Messire Anne de Montmorency grand Maistre & Mareschal de France, & à Messire Philippe Chabot Admiral de France, de prendre & accepter l'Ordre de la Chevalerie du Roy d’Angleterre.

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